Depuis 1974 et la guerre qui a fait rage sur l'île de Chypre suite au coup d'Etat perpétré contre le Président Makarios, la Turquie maintient un fort contingent militaire sur le tiers Nord de l'île (en jaune sur la carte) afin de protéger les intérêts de la population turque qui y réside. Longtemps, les négociations n'ont pu avoir lieu. Ce n'est qu'après 2003 et la création de points de passage sur la "Ligne Verte" qui sépare l'île en deux que la situation s'est un peu détendue. Mais c'est réellement à partir de février 2008 avec l'élection à la présidence chypriote du communiste chypriote grec Christofias et l'ouverture symbolique de la Rue Ledra de Nicosie (la capitale), point de passage de la "Ligne Verte", que les négociations ont réellement pu reprendre entre Christofias et Talat (président sortant de la partie chypriote turque), notamment grâce aux propositions faites par l'ONU, et parmi elles : la création d'une confédération.
Si la question nécessite des négociations c'est que chaque parti tient à défendre certains intérêts. Du côté chypriote grec, il est à rappeler que lors du référendum de 2004 devant statuer sur l'acceptation du projet de Kofi Annan (secrétaire général de l'ONU à l'époque) consistant à organiser la réunification de l'île par l'intermédiaire d'une confédération bizonale et bicommunautaire, la partie turque a répondu favorablement, tandis que la partie grecque, largement majoritaire en termes de population (plus de 70%) a répondu négativement. Ayant été élu récemment, Demetris Christofias se doit de respecter le programme sur lequel il a été élu : la population chypriote grecque n'étant pas favorable à la solution confédérale, il a donc fermement refusé cette proposition. En effet , le projet Kofi Annan ne règlerait pas la question des propriétés que les chypriotes grecs ont dû déserter entre 1974 et 1975 suite à l'occupation turque. Accepter un tel plan serait légitimer cette spoliation et une partie de la population chypriote grecque n'y est pas favorable. En plus de la création d'une confédération, Talat avait proposé la mise en place d'une présidence tournante qui n'est pas sans rappeler l'impasse politique antérieure à 1974 durant laquelle les droits de véto se succédaient et se répondaient entre les deux partis, conduisant à une paralysie des institutions et finalement à une tension dont l'issue a été le conflit armé de 1974.
En revanche, la situation est différente du côté chypriote turc. Lors du référendum de 2004 sur le plan Kofi Annan, les chypriotes turcs se sont montrés favorables à l'unification sur la base d'une confédération. Les propositions de Talat à Christofias vont dans ce sens, cependant, elles dénotent d'une réelle inquiétude à propos de l'autonomie de la partie turque de l'île. Etant en forte minorité, les chypriotes turcs ne veulent pas être écrasés par la domination grecque, voilà pourquoi les propositions de Talat exigent une forte autonomie judiciaire de la partie turque. Mais si la population turque est favorable à une réunification c'est avant tout parce-qu'elle n'est pas reconnue internationalement : son Etat s'est autoproclamé après le conflit de 1974 et seuls la Turquie, l'Azerbaïdjan et le Pakistan lui reconnaissent sa légitimité tandis que le reste de la communauté internationale ne le fait pas. De plus, une réunification signifierait pour la partie turque une entrée de droit dans l'Union Européenne (la partie grecque faisant partie de l'U.E) et donc un certain nombre d'avantages économiques, ce qui pour cette partie de Chypre, la plus pauvre des deux à l'heure actuelle, a son importance. Il est également probable que la Turquie elle-même (qui maintient toujours son contingent militaire sur la partie chypriote turque au Nord de l'île) fasse pression sur le gouvernement chypriote turc pour que celui-ci réalise l'unification, car l'entrée dans l'Union Européenne de la partie turque pourrait être un argument de poids dans sa propre intégration à l'Union Européenne. Un double argument puisque la Turquie pourrait alors déclarer à l'U.E qu'une population turque ferait partie de l'U.E alors même qu'on la refuse entre autres pour des raisons culturelles et géographiques.
La diversité des intérêts des deux partis rend les négociations difficiles. En janvier 2010 les deux chefs d'Etat se sont rencontrés de manière intensive mais il est désormais à craindre qu'aucune solution ne sera trouvé rapidement car le 19 avril dernier a signé l'élection au premier tour (avec près de 52% des voix) de Dervis Eroglu, un nationaliste notoire à la place de Mehmet Ali Talat. Désormais, la question de la réunification se trouve entre les mains d'un Chypriote grec communiste (Christofias) qui se conforme au refus de sa population de la solution confédérale et d'un Chypriote turc nationaliste (Eroglu) qui, au mépris de l'avis de ses concitoyens, pourrait bien mettre fin à toute négociation.
Post-scriptum : Un quelconque souci avec le nouvel habillage?
Pour ton habillage, j'ai un espace d'environ 15 px entre le corps d'article blanc et la scroll bar, la couleur y est la même que ton fond de blog.